Marrakech « arnakech », le terrain de jeux des frimeurs… Jamais je ne m’étais fait raconter autant d’histoires en si peu de temps. Le sourire aux lèvres, candidement, ils nous apostrophent sans relâche: « La rue est barrée, viens par ici! », « Je vais acheter un foulard là-bas, je vous emmène », « Comme tu es la première cliente de la journée… », « Hola! », « Bom dia! », « Buongiorno! », « Espagnola? »… La première journée, on flanche, on les suit et donne des dirhams, étourdies par le trafic des mobylettes et des ânes dans les minces ruelles et les souks. La seconde, on hésite, on sourit, on refuse et fait mine de continuer notre chemin qu’on a perdu depuis des lunes. Mais à la troisième journée, on embarque dans la danse. On se perd et se retrouve. On frime en souriant: « On a rendez-vous, on est pressées », « Mon mari nous attend »… C’est un tel bonheur que revenue à Paris pour une escale, quand un jeune Maghrébin m’apostrophe enfin pour me demander l’heure, alors que tout le monde m’ignore depuis deux jours, je tends mon cellulaire candidement. Et c’est Paris by night qui m’arnaque: il l’agrippe et part à la course tandis que je reste bras ballants, étonnée et presque souriante devant cet habile manège. J’ai des croûtes à manger, que je me dis. Attention Montréal!