Parc Compagnons-de-Saint-Laurent

Par Chloë Rolland 

 

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Il fait le tour de l’immense table en béton, se penche, ramasse des mégots. « De joints, me dit-il en passant tout près, pour répondre à mon sourire complice. »  Il fait quelques pas et rajoute, derrière moi : « S’il y aurait (sic) une belle femme comme vous qui voudrait de moi, j’arrêterais toute la drogue. »  Puis s’éloigne, sans rien demander. Première rencontre, je suis charmée.

La 2e est un pigeon qui en a pour mon croissant. Quelque chose est attachée à l’une de ses chevilles. Il boîte, amoché, et s’enfarge dans la chose traînante.

Dans le parc pour enfants, des pères qui se ressemblent étrangement, portant t-shirt, jeans et casquette communiste version américaine, semblent s’amuser davantage que leurs uniques pupilles qui les suivent à la trace, incertains.

Un vieil homme portant sur son dos un respirateur accroché à ses narines fume une cigarette.

Le temps coule, je lis des notes, me déplace lorsque l’immense peuplier me cache du soleil. Tous des gens seuls ici, me semble-t-il, assis autour de cette longue table de béton, devant leur sandwich ou leur junk. Drôle de banquet, je me dis, en fumant distraitement. Sans se parler, nous partageons une envie d’être ensemble, au soleil, attablés. Je ne suis pas dans ma cour, tu n’es pas dans ta cour, et je ne dirai rien mais je suis contente que tu sois venu.