La disparition de Megrez

Par Julien Bourbeau

La nuit. S’échapper du centre-ville trop éclairé. S’évader du concert qui nous a fait danser toute la soirée. Rentrer chez soi. «Chez soi», sans trait d’union. Les néons, la rumeur, le son de la contrebasse et des percussions s’éteignent derrière vos pas; la chamade bat encore. Mais peu à peu, c’est le calme qui marche, comme le chemin. C’est le moment où Baudelaire dit «Enfin ! seul !» Certes, les réverbères colorent le paysage. Offrent quelques clairs-obscurs. Des teintes de noir et d’orangé (comme dans les photos de Chloë et Kevin). Un ensemble sépia. De temps à autres, les phares des voitures qui tranchent la nuit en deux, vous aveuglent, vous révèlent zombie sur trottoir.

L’obscurité est alors un baume. Et c’est par la ruelle que vous rentrez en soi. Votre rythme cardiaque se stabilise enfin, votre vue s’est ajustée. La paranoïa se dissipe comme la clarté rosée du crépuscule. Peu à peu, votre corps fatigué tombe dans l’oublie et c’est le monde qui se révèle à vous, dans toute sa splendeur. L’esprit de la nuit s’anime comme un chat.