Sur les traces de terres fantômes

Carnet de navigation no. 9. 

 

capture-decran-2016-10-19-a-20-58-59Extrait du texte Sur les traces… présentation, de Kathleen Gurrie

Saint-Nil, Saint-Paulin-Dalibaire, Saint-Thomas-de-Cherbourg, Saint-Octave-de-l’Avenir. Quatre villages sur les contreforts des Chic-Chocs, aux marges de l’écoumène. Des villages se retrouvant à la croisée de chemins qu’il faut cartographier à rebours. Des villages, derniers sursauts de la colonisation du territoire québécois, établis entre les deux guerres pour aider la population gaspésienne à sortir de la crise économique. Des villages, terres d’élection à défricher et à peupler. Des villages jugés non rentables et impropres à la modernité. Des villages rayés de la carte dans les années 1970 par une nouvelle génération d’experts en rationalisation de l’espace. Autrement dit, il était une fois quatre villages qui aujourd’hui n’existent plus.

C’est au bout de routes qui ne mènent nulle part, sur un territoire plus grand qu’une ville moyenne et où la nature reprend ses droits depuis quarante ans, que nous avons convié les membres de La Traversée – Atelier québécois de géopoétique à vivre un atelier nomade les 4,5,6,7 septembre 2009. Et, pour une rare fois, ils ont eu la difficile tâche d’appréhender un territoire de l’intimité, intimité inhérente à la fonction première d’habiter. Mais ça, nous ne le savions pas d’emblée.

Quand l’idée de cet atelier a été lancée, nous avons d’abord étudié de vieux plans de cadastre que nous avons comparés avec les cartes Google, pour tenter de retrouver ces villages. D’abord, Saint-Nil où nous nous sommes perdus sur des routes difficiles et envahies de végétation, ce que nos cartes ne montraient pas. Puis, dans une tentative pour trouver une route Saint-Thomas-de-Cherbourg, la voiture est restée prise dans un cratère rempli d’eau. À Saint-Paulin, nous avons passé tout droit en cherchant une route inexistante. Et, après plusieurs allers et retours sur la 132, la route jusqu’à Saint-Octave-de-l’Avenir – magnifique au pied des montagnes bleues – est enfin apparue. Il nous aura fallu trois repérages (juillet 2008, septembre 2008 et juin 2009) et des heures de route pour concevoir la géographie des lieux.